"Penser l'événement" (Hannah Arendt)
Une page ouverte
Réflexions sur la pensée libre (chez les juifs, les chrétiens et les musulmans) et la religion
à propos du livre
d’ Alain de Libera
Raison et foi
Archéologie d’une crise d’Albert le Grand à Jean-Paul II
Edtions du Seuil, 2003
Que serait, interroge Alain de Libera, “une pensée qui, au plus fort des luttes, des conflits et des censures parisiennes des années 1260-1270, en plein affrontement entre averroïstes et antiaverroïstes, ne se laisserait reconduire ni à Averroès ni à Thomas, ni à la critique du premier par le second ? Une pensée de province ? Une pensée alternative ? Une pensée libre sans enjeux ? Peut-être plus simplement, une pensée méconnue, car enfermée, avec tout le siècle, dans un schéma historiographique trop étroit.”
Une pensée libre. Telle est celle d’Albert le Grand (1195-1290), professeur au studium dominicain de Cologne où il a comme élève Thomas d’Aquin. Lumineux Moyen Age où les enjeux transcendent souvent les nôtres, lumineux Moyen Age qui fait signe devant nous.
Une grand crise a marqué le XIIIème siècle, qui se poursuit jusque dans les encycliques de Jean-Paul II. Une crise entre la raison et la foi. Alain de Libera s’attache à démontrer que les termes en ont été mal posés par les autorités de l’Eglise et ont handicapé toute forme de reconnaissance d’une “pensée libre”. De quoi est-il question ?
L’alternative offerte en ces temps se situe dans la confrontation entre Thomas et Averroès. Thomas lie la raison au christianisme alors que pour Averroès “le chemin qui conduit le philosophe à la vérité se fait dans la continuité de la tradition prophétique”. Cela explique, selon le philosophe de Cordoue, les conversions successives des philosophes aux diverses révélations.
La thèse d’Albert, écrit A. de Libera, indique une autre voie. Selon le Colonais la théologie véritable, la “science admirable de Dieu” ne passe pas par la “démonstration philosophique”, car “Dieu est étranger à la sphère du causé”. Comme chez Maître Eckhart, il est “sans pourquoi” et inaccessible en son être à partir des effets naturels : “On ne démontre pas ce qu’est Dieu en lui-même. On s’unit à lui”. Il n’y a donc pas d’opposition entre philosophie et théologie qui toutes deux sont des sciences ayant chacune leur objectif. La philosophie vise la sagesse, et la théologie vise la connaissance unitive de Dieu. La théologie n’atteint Dieu “qu’à partir de la lumière divine elle-même, dans la lumière infuse, le don de la sagesse au-dessus de la nature”.
Telle est la “vision pacifiée” de la montée philosophique vers l’intellectus divinus et la montée théologique vers l’unitio. Ainsi les deux objectifs se rencontreraient par des voies différentes. Philosophie et théologie travaillent sur l’intellect, terme classique que l’on retrouve dans l’histoire de la philosophie : l’intellect agent-acquis d’Al-Farabi, l’intellect saint d’Avicenne et l’intellect divin d’Aristote.
Dans l’oeuvre d’Albert il n’y a pas de faux drame scolastique, pas d’opposition entre foi et raison. Il n’y a pas de place non plus pour la théorie d’une double vérité et l’installation d’un dispositif policier et inquisitorial à l’égard de la pensée.
Et pourtant c’est ce qui s’est passé au fil des nombreuses condamnations universitaires qui marquent cette crise du XIIIème siècle. En 1241 advient une première condamnation contre Scot Erigène et la diffusion des idées grecques. En 1270, Etienne Tempier, évêque de Paris, interdit l’enseignement de 13 thèses philosophiques (l’unité de l’intellect, le système émanatiste du péripatétisme, la théorie des Intelligences et l’astrologie). Le 7 mars 1277, le même Tempier interdit 219 thèses philosophiques où il veut stigmatiser l’idée (qu’il réprime) de deux vérités (philosophie et foi). Mais il ne touche pas son objectif car personne n’avait professé l’existence d’une double vérité.
La théorie de la double vérité est alors restée comme le produit d’un faux combat contre une fausse thèse hérétique supposée par l’institution ecclésiastique.
Un combat semblable avait déjà au lieu, dans le Sud de la France, vers les années 1230, autour de l’oeuvre de Maïmonide. La traduction en hébreu du Guide des égarés, le 30 novembre 1204, par Samuel Ibn Tibbon, avait ouvert pour les juifs du Sud de la France la voie des études philosophiques et scientifiques. Certains rabbins refusèrent violemment les études philosophiques et condamnèrent l’oeuvre de Maïmonide en portant à l’Inquisition le Guide des égarés et le Livre de la connaissance afin qu’ils soient brûlés. Tout le XIIIème siècle est marqué de ces vives polémiques, pour ou contre Maïmonide, jusqu’à une nouvelle crise au tout début de XIVème siècle, juste avant l’expulsion des juifs de France, par Philippe le Bel.
L’interdiction des études philosophiques visant à séparer le Talmud et la Bible des lectures philosophiques produisit malencontreusement dans le monde juif les premiers éléments d’une “religion juive” dont la configuration illusoire adviendra avec l’émancipation des juifs dans le cadre de la philosophie des lumières et de la Révolution française.
L’idée d’une religion juive, séparant la raison et la foi, ouvre un abîme de problématiques erronées, effaçant la dimension d’une pensée libre, celle dont parle A. de Libera commentant Albert le Grand, pensée qui ignore les arcanes de la double vérité.
La crise juive du XIIIème siècle avait produit l’illusion d’une religion, et elle rendait impossible la lecture de Maïmonide en tant qu’il est à la fois codificateur de la loi et philosophe. Comment Maïmonide a-t-il pu écrire à la fois le Michné Torah (la codification de la loi) et le Guide des égarés ? Par-delà les errements du XIIIème siècle (juifs et chrétiens), cette question est encore devant nous.
Maïmonide développe de nombreux thèmes que l’on retrouve chez Albert, en particulier celle de la connaissance unitive qui n’est pas le contraire de la philosophie, thème qui est développé au chapitre 51 de la troisième partie du Guide, texte particulièrement incriminé par ses adversaires. C’est dans ce contexte de crise que les institutions ecclésiastiques obligent, dans la coupure avec la philosophie, à faire des textes révélés des textes de foi, et à produire l’illusion d’une double vérité.
Des grands penseurs, astres solitaires, nous avaient mis sur une autre voie. Averroès, Maïmonide, Albert. Pourrions-nous envisager alors comme réponse inédite à la censure par l’institution, l’émergence de courants mystiques qui prennent le relais de ces pensées libres : le soufisme, la cabale et la mystique rhénane ?
Alors oui, nous dirons que “la pensée libre et sans enjeux”, “la pensée alternative” se développe loin des institutions, loin des capitales, et se déploie “en province”, là où résonne encore et toujours la parole des philosophes et des prophètes.
Monique Lise Cohen
LES CHEMINS DU CŒUR
Journée d’étude
organisée par l’Unité de recherche (ISTR) sur le thème de :
« La circoncision du cœur »
Deutéronome 10, 16-17 et 30, 6
Epître aux Romains 2, 28-29
Mercredi 13 juin 2007
Ouverture à 9h30
9h45 - Le cœur dans la Bible hébraïque
Bernadette Escaffre
Docteur en Sciences bibliques de l’Institut Biblique Pontifical de Rome
10h - Circoncision du cœur et dévotion au Sacré Cœur
Marie-Hélène du Parc Locmaria
Doctorante
10h30 - Prière du cœur et circoncision du cœur
Brigitte Esteban
Animatrice au Centre audio-visuel diocésain
11h - Médecine du cœur d’après les écrits Bahai’s
Shahnaz Daghighi
Docteur en médecine
Questions et dialogues jusqu’à 12h – Ouverture à 14h l’après-midi.
14h15 - Circoncision et psychanalyse
Kalou Estrella
Cheffe du Service du Réseau des familles d’accueil Clémence Isaure (CSST = Centre de soins spécialisés pour toxicomane
14h45 - Approches occidentale et hébraïque de la question du cœur
Monique Lise Cohen
Docteur ès lettres
15h15 – Cœur et circoncision dans le Nouveau Testament
Bernadette Escaffre
Docteur en Sciences bibliques de l’Institut Biblique Pontifical de Rome
Questions et dialogues jusqu’à 17h30
Institut catholique
31 rue de la Fonderie
31000 Toulouse
(Salle D2, au fond de la cour à gauche, 2ème étage)
Entrée libre
Lettre à des journalistes sur la question de la sainteté.
Dans la violence actuelle qui bouleverse le Moyen Orient, je voudrais me permettre d'intervenir auprès de vous en faveur d'une exigence intellectuelle et morale dans le langage. S'il est question de la sainteté de Jérusalem et de lieux saints dans cette ville, nous devrions nous interroger sur la question de la sainteté et éviter les abus de langage qui confondent le saint et le sacré.
Toute l'oeuvre d'Emmanuel Lévinas, magistrale pour notre temps, est là pour témoigner de cette problématique.
Le sacré est une attitude des religions païennes anciennes qui placent des divinités ou des forces divines dans des choses. La sainteté par contre est une attitude humaine, une qualité de l'action humaine, "à l'image de Dieu", comme nous l'enseigne un passage du Lévitique "Soyez saints, car moi l'Eternel, votre Dieu, Je suis saint" (Lévitique 19,2)
Le sacré incarné dans les choses mène à la violence absolue car il surgit dans la logique des choses. La logique de meurtre est alors inéluctable.
La sainteté mène à une attitude de réserve de l'être humain. Ces thèmes-là sont largement définis dans les Livres saints des trois grandes religions monothéistes, christianisme, judaïsme et islam.
Car nous sommes des religions du livre, et même si l'Occident est largement déchristianisé, même si les journalistes sont souvent athées, il n'en demeure pas moins que les deux sources de l'Europe, la philosophie grecque et la Bible, permettent d'élever la parole au niveau de la connaissance de ce qu'est l'écriture, de cette réserve qu'implique la sainteté, loin des dérives meurtrières du sacré.
Comme le dit Emmanuel Lévinas : la paix n'est pas qu'un concept politique. La paix a une dimension métaphysique. Et si les journalistes, dans ce conflit cruel, prenaient également en charge le niveau de cette parole pour le monde ?
(paru dans la Dépêche du dimanche 22 octobre 2000)
Laïcité et judaïsme
L’histoire des Juifs et de la laïcité est une histoire
paradoxale. Si la laïcité définit un espace commun pour
la vie publique du citoyen et un espace privé pour la vie religieuse
de l’homme, les Juifs ont vécu et connu cette dissociation dans
les siècles de leur existence marrane en Europe. Juifs en secret et
chrétiens en public, ils ont expérimenté cette dualité de
la personnalité fondatrice de l’esprit moderne.
Lorsqu’ils bénéficièrent de l’émancipation
dans la suite de la Révolution française, leur action en faveur
de la laïcité était animée par le désir d’exister
comme juifs dans la vie de la nation. A la différence des autres mouvement
laïques qui voulaient effacer le religieux de la sphère publique,
les Juifs ont revendiqué la laïcité au nom du judaïsme.
Cette aventure paradoxale ouvre tout un champ d’interrogations qui ne
se disent pas selon la façon traditionnelle dont la laïcité a
oeuvré pour l’effacement du religieux de la scène publique.
L’émancipation des Juifs et leur entrée dans la laïcité a été définie
de la sorte par le député Clermont-Tonnerre à l’Assemblée
Nationale, en décembre 1789 : “Il faut tout refuser aux Juifs
comme nation, et accorder tout aux Juifs comme individus. Il faut qu’ils
ne fassent dans l’Etat ni un corps politique ni un ordre. Il faut qu’ils
soient individuellement citoyens...” Nous allons étudier les aspects
positifs mais aussi négatifs de cette proposition.
Il est positif et généreux de considérer que les Juifs
font partie de la nation française, et le principe d’intégration
individuelle est à bien des égards une protection. Annie Kriegel
remarque que la réussite de ce principe d’intégration individuelle
a protégé les Juifs de France pendant la Seconde Guerre mondiale.
En effet les Allemands ne réussirent pas à regrouper les Juifs
de France dans des ghettos comme ils le firent dans les pays de l’Est
de l’Europe. L’idée d’une loi commune, de l’égalité de
tous devant la loi est également généreuse. Enfin le principe
de la liberté et de la pluralité religieuse déjà affirmé au
XVIIème siècle lorsque les Provinces Unies se sortirent du joug
espagnol, est une nouveauté féconde pour l’Europe. En effet
lors de la constitution des Etats-nations, au XIVème siècle,
les rois qui se séparaient de la féodalité et de la puissance
universelle du pape, affirmèrent le principe de la loi commune mais
aussi celui de l’exclusivité d’une religion dans l’Etat,
suivant le principe du droit romain qui préfère une même
religion pour le souverain et ses sujets. La Révolution française
par contre affirma positivement l’uniformité de la loi et la pluralité religieuse.
Quels peuvent en être les côtés négatifs ou plutôt
susceptibles de malentendus? Contrairement à la logiques d’assimilation
comprise dans le principe d’intégration tel qu’il fut formulé à l’époque
de la Révolution française, les Juifs sont restés un peuple.
Ils sont un peuple, mais pas uniquement à cause de l’Etat d’Israël
d’aujourd’hui. Nous pourrons interroger la nature de ce peuple.
D’autre part le principe de la loi commune a été largement
débattu et affirmé par Napoléon au début du XIXè siècle.
Il fit réunir un “Grand Sanhédrin”, sur le modèle
du Tribunal juif antique, afin d’y faire examiner la compatibilité de
la loi juive avec la loi française. Les Juifs répondirent positivement à cette
exigence mais du point de vue de la loi juive elle-même (le Talmud) qui
dit ainsi : “Dina de malkhouta dina”, c’est-à-dire
: la loi du royaume c’est la loi. C’est la loi juive qui exige
l’obéissance à la loi du pays d’accueil et ceci depuis
les temps les plus anciens de l’exil à Babylone. Enfin la Révolution
française dans la suite de la philosophie des lumières voulut
faire exister le judaïsme comme religion selon des termes qui s’apparentent
aux religions chrétiennes. Le mot “religion” est lui même
issu de l’expérience chrétienne. Mais le judaïsme
n’est pas une religion et ne peut non plus se définir dans la
nouvelle société laïque, comme une croyance dans la sphère
de la vie privée. Le judaïsme organise une socialité textuelle
et une communauté juridique (selon les principes d’une loi qui
ne cherche pas à s’opposer à la loi du pays d’accueil).
Qu’est-ce que l’expérience juive? Que peut-elle nous enseigner
sur la laïcité? On parle des Juifs depuis les temps de l’exil,
depuis la destruction du premier Temple de Jérusalem. Il est question
des Juifs dans le Livre d’Esther à l’époque de l’exil
des Judéens en Perse. Avant il était question des Hébreux
ou de la personnalité d’Israël. L’existence juive est
une existence exilique, marquée par le bilinguisme, c’est-à-dire
l’usage de la langue maternelle ou langue du pays d’accueil et
la pratique de l’hébreu (langue paternelle) dans l’étude
de la Bible et des commentaires et dans la liturgie. Nous pouvons remarquer à ce
titre que contrairement à certaines affirmations, les Juifs ont toujours
connu l’hébreu. Le commentaire juif se déploie comme un
texte en glose autour du texte biblique mais aussi en intégrant des éléments
de la culture du pays d’accueil. Ainsi Ezra le scribe écrivit-il
la Torah en hébreu carré, c’est-à-dire en caractères
assyriens. Il serait alors inexact de définir la nation juive par le
critère de l’identité, car l’existence juive façonnée
dans le bilinguisme est plutôt celle d’une dualité féconde.
Dans la vie intérieure au peuple juif, nous retrouvons les éléments
de cette dualité. Une telle dualité est déjà donnée
dans la révélation initiale au Sinaï lorsque les Hébreux
recevant les Tables de la Loi, dirent : “Nous ferons et nous comprendrons” (Exode
24,7). Il n’y a pas de transparence entre l’action et la réflexion,
il n’y a pas de juste pratique pour une théorie vraie. Le sens
est devant nous. L’existence juive est celle d’une infinitisation
du sens. C’est pourquoi la socialité juive n’a pas institué de
tribunal d’inquisition pour juger de la lecture orthodoxe des textes.
Il est par contre requis d’écrire de nouveaux textes dans l’abandon
de la mythologie des origines. La lettre, comme le dit Benny Lévy, a
une “valeur séminale”, et Emmanuel Lévinas définit
ainsi l’existence juive : “une orthodoxie pratique et une hétérodoxie
spirituelle”.
La diaspora juive a instauré pour la modernité l’histoire
d’un peuple en exil qui choisit autour du livre une modalité singulière
et universelle d’exister. Le livre n’est pas un objet de commémoration
pieuse ; il ne se referme pas sur l’identité muette de soi-même
ou le retour à un passé mythologique. il ouvre l’avenir
et nous interpelle dans l’altérité. Il n’y a pas
de dépôt sacré des origines. Insistance sur la lettre -
qui n’est pas l’enveloppe charnelle du sens - pour en faire résonner
de nouvelles lectures dans la multiplicité des commentaires. Ainsi l’exil
se déploie comme abolition des mythes et fécondation de l’avenir.
Pourrait-on appeler cette existence juive plurielle et féconde, une
existence laïque? Pourrait-on appeler laïcité (une laïcité qui
ne soit pas alternative au religieux), la possibilité infinie de penser,
lire et écrire?
Les textes rabbiniques
anciens conçoivent l’idée d’une
sorte de religion universelle pour l’humanité fondée sur
quelques principes simples et qui dessine les aspects d’une société que
l’on pourrait dire laïque. Les textes nomment ainsi la religion
des “fils de Noé”. Noé qui fut sauvé du déluge
est le père de notre humanité. L’Alliance entre lui et
le Créateur, dont la manifestation visible est l’arc-en-ciel,
est l’Alliance entre Dieu et toute chair. Cette alliance comporte sept
commandements qui sont les fondements de la morale et de toute vie sociale.
Le traité Sanhédrin du Talmud les présente ainsi : “Nos
Docteurs ont dit que sept commandements ont été imposés
aux fils de Noé : le premier leur prescrit d’avoir des magistrats
; les six autres leur défendent : le sacrilège, le polythéisme,
l’inceste, l’homicide, le vol, l’usage du membre d’un
animal vivant”. Au-delà du respect de ces lois, il est permis
en totale liberté, de penser, lire et écrire.
Monique Lise Cohen
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Mise à jour : 23 janvier 2013