Monique Lise Cohen

La Philosophie des Lumières a laissé se développer une “religion naturelle” ou “religion du coeur” selon l’idée de la bonne nature et de la révélation intérieure du divin. Echo de la nature en nous, le coeur signe l’abandon du devoir être et de la transcendance pour laisser s’exprimer la morale de la bonté naturelle. Célébré dans le texte des lumières, le coeur est à la source d’un discours qui, comme une gnose, surgit hors du champ des rites, des textes révélés et des langues particulières. Transparence, immédiateté, présence : le coeur serait en Occident le lieu d’une révélation intérieure dans une quasi-identification au divin.
Dans cette recherche d’une religion universelle fondée sur la nature et le coeur, les philosophes des Lumières semblent dire que les Juifs, à cause de leur attachement à la lettre et leur implication dans une loi hétéronome, n’ont pas de coeur.

La loi juive nous enseigne au contraire : “Ne suivez pas le chemin du coeur et le chemin des yeux qui vous entraînent à l’infidélité” (Nombres 15, 39). Le Livre des 613 commandements précise que le penchant du coeur conduit à l’apostasie.
Quel enseignement l’hébraïsme peut-il apporter à l’Occident ? Le thème biblique de la circoncision du coeur pourrait-il être, pour les temps d’aujourd’hui, l’horizon de notre effort de pensée ?